Bonjour, chers auditeurs !
C’est Salomé qui vous parle, une élève du Lycée qui est déterminée à répandre le pouvoir des Lettres à l’école et à vous les faire goûter.
En ce sixième épisode de notre série littéraire Les Belles Lettres, je me suis décidée à vous parler d’un grand classique : La confusion des sentiments de Stefan Zweig.
Résumé :
Après qu’il ait été envoyé à Berlin pour étudier l’anglais, Roland délaisse ses études pour la vie festive de la ville ; alors que son père pense qu’il tient des débats autour de Shakespeare, c’est dans les bras des filles que Roland préfère passer ses nuits.
Mais, par malchance, ou plutôt par chance de ce coup du destin qui lui permettra de rencontrer son professeur, son père, lors d’un voyage d’affaires vient lui rendre visite et découvre les livres de cours à peine ouverts et rangés comme ils l’étaient au départ dans la bibliothèque de son fils.
Le jeune homme est alors envoyé dans une petite province allemande pour y accomplir, cette fois, pleinement ses études : une école de philologie anglaise, où, plus que de lui donner le goût pour la littérature et les études, un professeur passionné va lui ouvrir ses portes pour une relation unique et rare fondée sur l’amour de la littérature et de la réflexion philosophique et intellectuelle.
Or, au milieu de discussions enflammées, les sentiments de Roland prennent part à la conversation, sentiments que le professeur repousse de plus en plus froidement alors qu’il semble apprécier la place particulière que Roland prend dans sa vie. Quel est le mystère derrière le comportement ambigu de son “maître” comme il l’appelle ? C’est-ce que Roland tente de découvrir dans l’intensité de son désir qui grandit, tout en s’adonnant à une passion qu’il n’avait jamais connue jusqu’alors : celle de la littérature anglaise.
Analyse et critique :
Pour être tout à fait honnête, je n’ai pas l’habitude de lire des classiques de la littérature, mais après une année à me préparer au Bac de Français, ça m’a donné envie de m’y lancer ! Et pas seulement avec le Bac de français mais aussi avec un cours de littérature, en spécialité HLP qui m’a permis de découvrir un extrait magnifique qui m’a directement donné envie de lire la « Confusion des sentiments »
Avant de lire le livre j’ai été allée regarder le résumé au dos de l’ouvrage, et pendant ma lecture j’ai repensé à une remarque du résumé qui m’a laissée dubitative : la relation entre Roland et son professeur était décrite comme “...la recherche inconsciente d’un père...” ; cependant, s’agit-il vraiment d’un père si derrière la figure du professeur se cache plus un mentor ? Et peut-on vraiment parler de “recherche d’un père” si ce livre fait plutôt allusion au sentiment d’un désir naissant entre deux hommes, et aborde avec délicatesse la question du désir homosexuel, très réprimé et encore plus à l’époque de Zweig ou les nazis s’emparent peu à peu du pouvoir ?
Car, en plus de l’écriture fine et sensible de Stefan Zweig, c’est la complexité de ce sentiment amoureux, se traduisant par une forme de fascination pour son professeur chez le personnage de Roland, et fidèlement restranscrite dans le texte qui m’a le plus touchée dans ma lecture. Plus que de capter nos sensations avec des comparaisons ou des métaphores, ce qui fait de l’écriture de Zweig une écriture sensationnelle, La Confusion des sentiments est la preuve pour moi qu’essayer de raconter l’amour lorsqu’il a été intensément vécu reste la représentation la plus fidèle de ce sentiment. Car si le désir et la passion restent souvent inexplicables, la confusion des sentiments est une manière parmi d’autres de raconter l’amour. Raconter l’amour restera toujours un échec mais le raconter à soi-même plus qu’aux autres est ce qui fait la beauté de ce récit et de la littérature ou l’art en général.
Une autre chose qui m’a fait dévorer ce livre, reste l’écriture de Stefan Zweig : elle m’a tout bonnement émerveillée, par la diversité de sensations auxquelles elle fait appel, sa finesse et sa synesthésie, ce mélange de sensations ; je dirais même que, par son écriture, l’auteur nous fait gouter à chaque couleur plus qu’il ne nous fait lire une simple écriture. Chaque paragraphe ou presque me donnait envie de tout surligner ! Le discours du professeur parlant de Shakespeare à ses élèves laisse penser que Shakespeare est en fait « un phénomène météorologique » ou sinon l’expression « l’expression sensible d’une époque devenue passionnée ». Ou encore l’intensité du désir se fait ressentir par la tension d’un suspens comme celui d’un roman policier, preuve qu’en plus de mêler et d’entrechoquer les sensations les unes aux autres, l’écriture de Stefan Zweig sait mixer plusieurs genres en même temps.
Extrait p. 84-86
Ainsi, comme conclusion de cette plongée littéraire dans l’œuvre de Stefan Zweig, peut-être faudrait-il expliquer le titre La confusion des sentiments. Or, toute œuvre d’un artiste doit toutefois conserver un peu de son mystère. C’est pourquoi je vous laisse avec cette phrase de Roland Barthes dans Fragments d’un discours amoureux, qui, je l’espère, permettra peut-être d’éclaircir pour vous la complexité d’une synesthésie confuse des sentiments, que vous trouverez dans cette belle histoire : « Suis-je amoureux ? – Oui puisque j’attends. L’autre, lui, n’attend jamais. Parfois, je veux jouer à celui qui n’attend pas ; j’essaye de m’occuper ailleurs, d’arriver en retard ; mais à ce jeu je perds toujours […] L’identité fatale de l’amoureux n’est rien d’autre que : je suis celui qui attend. »
Ce sera tout pour ce livre et je vous souhaite une excellente lecture/un excellent voyage dans vos rêves !
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